Gérer les conflits au sein de son cabinet



Les sources d'émergence des conflits:

Le cabinet d’expertise-comptable, comme toute entreprise est susceptible de connaitre une crise au sein de ses services. La crise est un signal qui met en évidence un déséquilibre, lorsque certaines parties (on englobe l’ensemble des collaborateurs du cabinet) ne s’entendent pas sur un point particulier et « sont prêtes à user de nouvelles méthodes pour se faire entendre ou comprendre».

Un conflit peut avoir des conséquences positives si sa résolution permet de trouver une solution constructive à un problème, mais un conflit  peut aussi avoir de lourdes conséquences  sur le climat social et, à terme sur la productivité et la pérennité du cabinet.

Un conflit peut avoir pour origine un simple désaccord et s’amplifier.

« Un conflit éclate lorsque les forces en présence ne voient plus de possibilité de dialoguer, de s’entendre, de communiquer …. Chaque partie perçoit que ses intérêts sont menacés et elle estime qu’elle a le droit avec elle» [1].

L’origine d’un conflit en cabinet peut être d’ordre organisationnel, psychologique ou économique.

▪les sources d’ordre organisationnel :
Elles sont liées à :
- un dysfonctionnement dans l’organisation du cabinet : mauvaise répartition des dossiers, interdépendance des tâches ; manque de supervision et d’encadrement.
- un dysfonctionnement lié à une mauvaise communication interne entre les différents collaborateurs entre eux, entre les différents services ou avec la hiérarchie ;
- un dysfonctionnement dans les moyens et ressources mis à la disposition : outils informatiques, dossiers de travail  mal adaptés, surcharge de travail, manque de formation.

▪Les sources d’ordre psychologique:
Elles sont liées aux différentes personnalités des collaborateurs.
L’interaction entre ces différents tempéraments peut créer des divergences de point de vue, qui peuvent s’exprimer par différents sentiments : l’angoisse, l’agressivité, la frustration.

▪Les sources d’ordre économique:
Elles sont relatives à une mauvaise répartition de la valeur ajoutée du cabinet : manque d’équité dans les rémunérations, manque de reconnaissance pour l’implication ou le travail fourni.

Prévenir les conflits:


Les conflits naissent d’un manque de communication et de consensus.
En effet, l’amélioration des relations humaines passe par l’écoute active et le dialogue.
Le manager doit être attentif à tout changement de comportement de ses collaborateurs et doit favoriser les discussions de groupe pendant les pauses par exemple, afin de permettre aux collaborateurs d’exprimer leurs incompréhensions et mettre à plat les tensions naissantes. Une pratique qui est rare en cabinet mais qui pourrait être intéressante serait la boite à suggestions anonyme où tous les collaborateurs peuvent exprimer des remarques, des idées, des suggestions.

Deux concepts  permettent de favoriser l’écoute :

L’empathie :
Selon, Carl Rogers [2], l’empathie est  une « relation particulière qui consiste à se mettre à la place de l’autre, à accéder à la vision du monde de l’autre ». Cela ne signifie pas assumer les problèmes de l’autre mais dans une situation d’incompréhension, l’empathie permet de satisfaire le besoin d’être compris  et éviter l’agitation.

Le message « je » :
Selon Thomas Gordon [3], le « tu » (que nous pouvons décliner au « vous » dans une relation professionnelle) tue la relation car il est porteur de jugements et devenir un message toxique, à ce titre il faut donc privilégier le « je ». En effet, face à un jugement le reflexe est la défense, la riposte. Face à un début de conflit entre collaborateurs, l’EC, avec sa « casquette manager » doit mettre en place rapidement une médiation préventive afin d’éviter que les messages deviennent toxiques et que le conflit éclate. Il va recentrer le « débat » en mettant comme cartes sur table, les ressentis de chacun en évitant d’attiser les parties et tâcher d’agir en « passeur de messages ».

▪Eviter les  freins à l’écoute :
Malgré la pluralité et le développement des techniques de communication dans les cabinets d’expertise-comptable, il n’est pas certain qu’il y ait une réelle écoute entre les différents acteurs du cabinet.
Deux freins d’ordre cognitif semblent expliquer cette difficulté d’écoute [4]
Le premier frein est la confusion entre comprendre et être d’accord, de nombreuses personnes se sentent obligées lorsqu’elles écoutent d’autres personnes de corriger immédiatement les dires car se taire signifierait pour elles, qu’elles sont d’accord. Or la qualité d’écoute repose sur le fait de comprendre l’autre mais pas forcément d’être d’accord avec lui.
Le second frein est le besoin de « vider son sac » lorsque nous ressentons une frustration, une incompréhension. Dans cette situation, nous sommes en recherche d’empathie mais nous ne sommes pas en mesure d’en transmettre.

Gérer les conflits:


La négociation est un processus par lequel deux ou plusieurs personnes tentent d’atténuer ou d’éliminer un conflit entre elles. La finalité est d’arriver à un compromis grâce notamment  à la communication, la persuasion et la concession mutuelle.

La médiation est une « négociation entre parties adverses en présence d’une tierce partie, neutre, dont le rôle est de faciliter la recherche d’une solution au conflit. Le médiateur n’a aucun pouvoir pour imposer une solution aux parties ».Notons tout de même que l’arbitrage hiérarchique, bien qu’ayant un effet direct et rapide menace à moyen terme le climat social du cabinet et risque de développer l’individualisation donc de compromettre « l’esprit d’équipe » du cabinet. Il est nécessaire en période de conflit d’instaurer un cadre stable, en déterminant les règles fixant les modalités de discussion.

 Un conflit se manage et ne se résout pas en quelques heures ou quelques jours. La première étape est d’apaiser les tensions existantes en tâchant d’adapter une communication adéquate. En effet, le manager doit adopter une attitude et un discours qui « mettent à plat » les problèmes. Etre pédagogue va permettre  de ne pas céder à l’affolement et l’agitation mais de permettre d’offrir une stabilité. Il faut rechercher la cause de la résistance/du conflit et amener les collaborateurs à exprimer leurs attentes non satisfaites et leur faisant faire des propositions pour « crever l’abcès ». 
Il faut cependant faire attention aux fausses promesses qui diminuent la confiance des collaborateurs envers leur manager.
Il est indispensable pour l’EC d’incarner l’autorité hiérarchique car dans une situation instable le phénomène de l’exemplarité joue encore plus. Une situation de conflit est anxiogène pour l’ensemble des collaborateurs concernés de près ou de loin, aussi en période de conflit, l’EC doit sécuriser et valoriser ces collaborateurs afin d’améliorer le climat social. La sécurisation met en évidence un respect mutuel et l’importance apportée à son équipe.







[1] « La gestion des conflits dans l’entreprise ».Jean-Luc GALIZIA. Faculté d’Aix en Provence
[2]Psychologue américain (1902-1987)
[3] Docteur en psychologie clinique, qui a fondé le modèle Gordon, synthétisé dans l’ouvrage « Relations efficaces », Le jour Editeur .2002.
[4]« La médiation en entreprise ».Arnaud STIMEC .Edition DUNOD p 42
[5]« L’accompagnement professionnel ? Méthode à l’usage des praticiens exerçant une fonction éducative. Michel VIAL, Nicole Caparros-Mencacci. Edition De Boeck » p 61
[6] « La médiation en entreprise ».Arnaud STIMEC .Edition DUNOD